Bonjour à toutes et tous!
Je sais, cela fait bien longtemps que je n’ai pas écrit ici. Quelques mois pour être plus précise. Bon.
Pour être honnête, je crois que tous les ans ma vie « ordinaire » se met en parenthèse entre fin mai et fin août, la période à laquelle je rentre en France pour présenter mon travail de l’année.
Cela fait quelque temps maintenant que je me dis « Clara il serait bien que tu reprennes ton blog maintenant, tu es rentrée au Japon plus d’excuses! »
Sauf que j’ai tellement de choses à raconter que je ne savais plus par quoi commencer!
J’ai donc décidé de reprendre les évènements plus ou moins par ordre chronologique, en commençant par une merveilleuse collaboration réalisée le 09 juin dernier avec la talentueuse Louise Ebel du blog Pandora.
Je vous présente : The Heron Maiden ou Sagi Musume (鷺娘).
Sagi Musume est une pièce de Kabuki dont la version moderne la plus connue est certainement celle de l’acteur Tamasaburo.
N’hésitez pas à jeter un oeil à l’ouverture de la pièce en vidéo pour apprécier toute la grâce et la précision de mouvement de cet acteur.
Cette pièce raconte l’histoire d’un héron blessé qui fut sauvé, soigné,
puis relâché par un jeune homme au bon coeur.
Le temps passe et notre jeune homme rencontre une belle jeune femme dont il tombe amoureux, comme s’il l’avait toujours connue.
Ils décident de se marier et leur vie ensemble est heureuse, subvenant à leurs besoins grâce à la vente de soie brocardée aux délicats motifs d’oiseaux
que la jeune femme tisse chaque jour de ses mains.
Elle pose seulement une condition :
le jeune homme ne doit jamais la voir lorsqu’elle tisse sa fameuse soie.
Bien évidemment, comme dans tous les contes,
la tentation est trop forte et notre héros transgret l’interdiction.
Il découvre alors un héron, ce même héron qu’il avait sauvé auparavant
et qui n’est autre que sa femme.
Humiliée et désespérée, la jeune femme héron s’enfuie et s’envole au loin à jamais.
Dans la pièce de Kabuki, la scène finale où l’oiseau est découvert est particulièrement puissante en émotions, transmises à travers la danse.
On ressent tout le désespoir et la souffrance endurés par la jeune femme.
Si vous allez jeter un oeil à la vidéo en question peut-être serez-vous aussi frappés par la ressemblance entre cette merveilleuse danse et celle de Sayuri dans « Mémoires d’une Geisha » une version vulgarisée et américanisée qui semble fortement inspirée de Sagi Musume, et tranche avec la gestuelle de Tamasaburo, si précise et poétique dans chaque mouvement.
Mais revenons-en à cette fameuse collaboration : lorsque Louise m’a proposé de m’occuper du stylisme sur cette séance, j’avoue avoir ressenti autant de pression que d’excitation!
En effet, le but était de l’habiller, la transformer en japonaise, en respectant les règles de l’art tout en apportant une touche européenne à l’ensemble.
Moi qui jusqu’à maintenant n’avait pratiqué le kitsuke (art de l’habillage des kimonos) que de manière autodidacte, je me lançais là un sacré défi!
J’ai décidé de rester dans un canevas principal de blanc, noir et rouge comme dans la première et la dernière scène de la pièce, mais en remaniant la distribution des teintes, et en mixant certains éléments qui ne se retrouvent d’habitude pas ensemble.
Sous le kimono, le nagajuban est orné d’un col han-eri blanc brodé de fines fleurs roses pale, et d’un date-eri rouge vif qui rappelle notamment ceux que portent les mariées pour trancher avec leur kimono d’un blanc immaculé.
Enfin, grâce à mon amie Natacha qui possédait cette merveille, nous avons eu la chance d’habiller cet ensemble d’un magnifique Uchikake blanc brodé d’oiseaux.
Quand je suis arrivée pour l’habillage, Louise avait déjà réalisé son maquillage, nous nous sommes donc tout de suite mises au travail!
Après une bonne heure de travail pour l’habillage et quelques retouches maquillage et coiffures, nous nous sommes rendus au jardin d’agronomie tropicale grâce à notre super chauffeur Lucile!
Sur ce, je vous laisse découvrir la première partie des photos
prises par la talentueuse Alexandra Banti
Cette première partie mise dans la boite, nous avons effectué un changement de costume pour illustrer la partie plus animale du personnage.
Il se trouve que j’avais réalisé en 2012 une robe Tsuru (grue japonaise) issue d’une série « Bestiaire » qui était parfaite pour ce shoot, la grue et le héron étant proches dans leur physionomie, et cette robe reprenant le code couleur blanc, rouge et noir.
Dans cette deuxième série, Louise a voulu exprimer à la fois la nostalgie, la peine, voir la souffrance de la femme découverte et redevenue héron.
Sur cette dernière photo, la jeune femme oiseau est sur un pont, représentant le passage entre la vie et la mort, l’attachement et le détachement.
J’espère que cette collaboration et cet article vous on séduit, j’attends vos commentaires!
Pour voir le post de Pandora sur cette séance, c’est par ici :
Pandora- The Heron Maiden (Sagi Musume)
Merci à Louise pour sa confiance, Alexandra pour ses magnifiques photos, Lucile pour son peigne de geisha et ses zoris, et Natacha pour son Uchikake et son han eri brodé!
Uchikake 打ち掛け : porté par dessus le kimono et le obi blancs de la mariée, le Uchikake est un kimono très épais brocardé dont la traîne est matelassée. Il peut être blanc ou de couleur.
Kuro Tomesode 黒留袖 : Le tomesode noir (kuro) est le kimono le plus formel porté par une femme mariée. Lors des mariages, il est le plus souvent revêtu par les mères des mariés. Il possède 5 kamons (blasons familiaux).
Han Eri 半襟 : Col amovible cousu sur le nagajuban (sous-kimono). Il peut être blanc ou de couleur, brodé ou non.
Date Eri 伊達襟 : Col amovible de couleur porté entre le han eri et le col du kimono, formant une fine ligne d’environ 5-7 mm